Un mot de RAVIE

À l’aurore, nous avons traversé le village, fourbus, harassé.e.s par les orages passés, en quête d’un chantier d’idéal, pour renouer avec le sens, avec le feu, avec la Vie.

Nous nous sommes retrouvé.e.s face à une forteresse d’apparence imprenable, mais qui était en fait ébréchée. Une fissure presque imperceptible, ouverte par d’autres, que nous avons fougueusement élargie avec nos ongles.

Nous avons vu de la lumière, alors nous sommes entré.e.s. Les sièges étaient encore chauds. Les murs encore secoués de vibrations.

Nous avons posé nos bagages. Nous y étions.

Nous y sommes.

Nous héritons. D’histoires, d’élans, d’ambitions, d’utopies. De sentiers battus avant nous. Par Herbert. Par Peggy. Par les traînes de tous les fantômes bien vivants qui ont hanté ces lieux.

Cette route, nous poursuivons son tracé. Nous la radicalisons. Nous y semons les mauvaises herbes de l’impertinence.

L’institution est un vieux pâtre sévère. Nous proposons de la dérider. De l’inviter à danser. Et si ça résiste, nous sortirons la glycérine.

On nous a dit tant de fois que c’était impossible. Faire de la scène notre métier ? Impossible. Créer nos propres projets ? Impossible. Construire collectivement ? Impossible. Gouverner collectivement ? Impossible ? Imaginer autre chose ? Forcément impossible. Circulez, vous n’avez rien à faire ici. Jusqu’à preuve du contraire…

Nous travaillons à dynamiter tous les impossibles qui barrent les destinées.

Notre présence ici est un geste militant.

Nous militons pour la vie et contre les systèmes nécrosés, sur scène et ailleurs. Nous luttons contre les cases qui nous étouffent, contre les assignations, contre les frontières.

Nous sommes douze, et ça n’est pas suffisant. Nous voulons être 100 000. Nous voulons être à la fois femmes, non-binaires, racisé.e.s, putes, prolos, invalides, hors-normes, illettré.e.s, déraciné.e.s, inadapté.e.s, insoumis.e.s, punk, queer, freak. Nous sommes de brèches et de fissures. Fêlé.e.s. Nous voulons faire monde, faire village. Ouvrir les portes de la maison. En faire un refuge sans clef.

Nous sommes imparfait.es. Naïf.ves, sans doute. Nous allons nous tromper, peut-être. Et alors ? Nous allons travailler. Joyeusement. Nous allons bâtir.